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Avec la TOHU, Montréal devient une capitale des arts du cirque


Lieu de naissance du célèbre Cirque du soleil et siège d'une école du cirque de niveau international depuis 20 ans, Montréal est sans doute devenue, avec l'achèvement de la TOHU, une des capitales internationales du cirque.

La cité des arts du cirque de Montréal, rebaptisée TOHU pour « tohu-bohu », une expression qui évoque le bouillonnement des idées et des gestes, et le désordre précurseur du renouveau, regroupe le siège social du Cirque du Soleil, l'École nationale de cirque, le Centre d'hébergement des artistes et le Pavillon. Inauguré officiellement il y a un an, le plus récent maillon de la chaîne, le Pavillon de la TOHU abrite le premier chapiteau permanent au Canada conçu spécifiquement pour présenter des spectacles de cirque. Cette immense salle à géométrie variable avec gradins amovibles peut accueillir près de 900 spectateurs. Le Pavillon contient également des salles d'exposition et sert d'accueil aux visites écologiques du site réhabilité de la carrière Miron.

L'architecture du Pavillon de la TOHU, qui lui a mérité des prix de la part de l'Institut du Design de Montréal, de l'Institut royal d'architecture du Canada, du Canadian Urban Institute et de Sauvons Montréal, rappelle à la fois l'histoire du cirque et celle du site où il a été érigé. « Les textures des panneaux de béton qui recouvrent la salle circulaire sont un clin d'oeil à l'histoire du cirque : chapiteau de pierre, chapiteau de bois, chapiteau de toile. Les couleurs, quand à elles, rappellent le minerai qui a été extrait de l'ex-carrière Miron et dont les nuances de gris colorent aujourd'hui les bâtiments du centre-ville de Montréal », explique le concepteur Philippe Lupien, de Schème consultants.

Bâtie en bordure nord de l'autoroute métropolitaine, la TOHU perpétue la tradition médiévale des cirques installés à l'extérieur des murs de la ville. La construction s'inspire également du cirque, la salle de spectacle constituant le centre névralgique du bâtiment tandis que les blocs rectangulaires qui logent l'administration, le bistro, etc. autour, évoquent les roulottes des saltimbanques.

D'abord voué à stimuler l'offre dans un des seuls secteurs culturels québécois où elle ne suffisait pas à la demande, le cirque, le mandat de la TOHU s'est élargi pour mieux s'enraciner dans son milieu. La TOHU a maintenant pour mission non seulement la formation des artistes de cirque et la création et la diffusion de spectacles, mais également la contribution à la revitalisation de ce qui est devenu le Complexe environnemental Saint-Michel sur le site de ce qui a été le deuxième plus grand site d'enfouissement de déchets en milieu urbain d'Amérique du Nord, et au développement du quartier Saint-Michel, un des plus défavorisés de Montréal. Mandatée par la Ville de Montréal pour concevoir et réaliser la programmation culturelle et environnementale du Complexe environnemental de Saint-Michel, la TOHU joue un rôle à la fois culturel, environnemental et social. Sa vocation sociale et environnementale se concentre au Pavillon, seul bâtiment de la cité ouvert au public.

Monument vert

Le site couvrant 192 hectares jouxtant la TOHU a d'abord été une carrière, source importante de matériaux pour la construction de la ville avant de devenir le plus éloquent symbole des atteintes portées à l'environnement, à la santé publique et à la qualité de vie à Montréal :à la fin des années 1980, près d'un million de tonnes de déchets y étaient enfouis annuellement. Y construire un bâtiment vert constituait un virage significatif et lançait un message clair sur sa nouvelle orientation.

L'utilisation de matériaux et d'éléments recyclés comme des poutres provenant des usines Angus et des panneaux d'autos tamponneuses du parc d'attraction de La Ronde dans la construction de l'édifice, et le recours aux énergies renouvelables pour son chauffage (grâce à un système d'échange thermique avec une usine voisine qui transforme les biogaz en électricité) et sa climatisation (par un bac à glace!) attestent de la volonté de la TOHU de faire sa part pour la planète. Le Pavillon est d'ailleurs certifié OR par le LEED (Leadership ion Energy and Environamental Design), le plus haut niveau de développement durable.

Par ailleurs, le travail se poursuit sur le terrain: d'ici dix ans le parc urbain aménagé dans l'ancienne carrière sera presque aussi grand que le Parc du Mont-Royal. On pourra notamment y faire du vélo l'été et du ski de fond l'hiver.

L'idée de développement durable qui a présidé à la conception de la TOHU sous-entend une volonté d'amélioration sensible et permanente pour l'ensemble de la communauté. Le terme « développement durable » s'applique tant à l'architecture verte, qu'aux animations qu'on trouve sur le site et aux emplois créés pour les citoyens du quartier.

Revitalisation urbaine

La population du quartier où s'est établi la TOHU affiche le plus bas taux de scolarité des 27 arrondissements de la ville. Plus du tiers des jeunes de 15 à 24 ans de l'arrondissement ne fréquentent pas l'école. C'est un des plus pauvres et aussi le plus multiethnique avec sa mosaïque de 65 nationalités différentes.

Chaque année la TOHU, source importante d'emplois, invite les résidents du quartier à une quarantaine de représentations gratuites. Le plus spectaculaire événement rassembleur du quartier est organisé par la TOHU. C'est la falla qui a lieu chaque année à la fin août sur la place publique de la TOHU. Cette falla s'inspire d'une ancienne tradition espagnole qui consiste à brûler une gigantesque sculpture de bois. La préparation de la fête, qui attire plus de 5 000 personnes requiert la participation des jeunes du quartier. Une dizaine d'entre eux sont mis à contribution pendant l'été pour réaliser l'immense sculpture de bois qu'on brûle à cette occasion.

Au cours de sa première année d'existence la TOHU a reçu plus de 90 000 visiteurs. Sa salle a accueilli cinq troupes de cirque et 11 spectacles gratuits, sa place publique a été l'hôte de dix grands rassemblements festifs et plus de 150 groupes de visiteurs ont participé aux visites guidées à saveur environnementale.
Louise Gaboury