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Article publié dans le webzine de Août 2017

Sicile : itinéraire arabo-normand


Parmi les nombreuses dominations que la Sicile a connues, celles des Arabes et des Normands ont laissé des traces indélébiles. L’Unesco a reconnu cet apport en retenant quelques beaux bâtiments témoins de cette période sur sa Liste du Patrimoine mondial de l’Humanité en 2015, les reconnaissant à titre d’exemple exceptionnel de syncrétisme culturel.

Si l’héritage laissé par ce glorieux intermède a survécu contre vents et marées, c’est que l’époque est considérée comme une des plus paisibles et des plus riches du passé de la Sicile. En ce temps-là, les peuples de différentes origines, Normands, Juifs, Arabes, Grecs, Lombards, etc., vivaient ensemble dans une belle interaction culturelle.

En arrivant en Sicile à partir de 1060, les conquérants normands n’ont pas fait table rase mais plutôt intégré le patrimoine arabe. Le roi Roger II parlait d’ailleurs la langue et en appréciait la culture. Il a régné sur une société tolérante, très productive, qui a contribué à asseoir la position de Palerme comme un des principaux centres culturels de la Méditerranée à l’époque.

Les villes vedettes de cet itinéraire ont chacune leur personnalité. Certaines ont une histoire si dense qu’elles méritent un séjour plus long, question de tenter d’en percer les mystères ou les curiosités. C’est le cas de Palerme où, par exemple, dans le quartier de la Kalsa, subsistent encore des plaques de rues en arabe, en hébreu et en italien, comme celle de la via dei Calderai.

Palerme

La cathédrale de Palerme raconte une partie de l’histoire de la Sicile. Elle a été érigée dans la plus ancienne partie de la ville, sur le site d’une ancienne basilique du IV siècle détruite par les barbares, à laquelle a succédé une construction du VIe siècle utilisée comme mosquée pendant la période islamique avant de redevenir chrétienne en 1072.

La première aile du Palais royal a été construite sous la domination arabe. C’est ici, dans la salle d’Hercule que siège l’Assemblée régionale sicilienne.

Dans ce monument, également connu sous le nom de palais des Normands, et aussi dans la Chapelle palatine, les influences croisées des différentes cultures qui ont marqué la Sicile se retrouvent dans une splendide décoration qui révèle des aspects islamiques, byzantins et occidentaux assortis harmonieusement. C’est un des monuments médiévaux les mieux conservés de l’île. Aux yeux de Maupassant, la chapelle palatine était « le plus surprenant bijou religieux rêvé par la pensée humaine et exécuté par des mains d’artiste. »

Parmi les autres églises qui font partie de l’itinéraire, celles de San Giovanni degli Eremiti, de San Cataldo,  et celle de Santa Maria dell’Ammiraglio. Santissima Trinità del Cancelliere bien que datant de l’époque arabo-normande, ne fait pas partie de l’itinéraire protégé par l’Unesco.

Monreale

Dans l’ombre de Palerme, la toute mignonne Monreale a peu à voir avec sa cosmopolite et grouillante voisine. L’ennui, c’est qu’elle est très touristique, à preuve le cours du cappuccino matinal au comptoir à 2,50€, deux fois le prix du marché…

C’est le prix à payer pour le siroter à côté de la cathédrale fondée dans les années 1170 à la suite d’un songe divin de Guillaume II. Alors qu’il s’était endormi à l’issue d’une partie de chasse, la Vierge lui indique en rêve l’emplacement d’un trésor. Ayant trouvé le trésor, il décide de le consacrer à la construction de cette cathédrale, qui est en fait un superbe complexe incluant un monastère bénédictin qui rappelle les cours intérieures des riches demeures arabes, et un palais.

Quel coup au cœur quand on y pénètre! L’intérieur somptueux contraste avec l’extérieur plutôt austère. Les architectes se sont inspiré de la cathédrale de Cefalù, en en modifiant un peu le plan.

Cefalù

La construction de la cathédrale commence en 1131quand le roi Roger II arrive à Cefalù après une longue et pénible navigation dans la tempête. Pour remercier le ciel de lui avoir permis de survivre à la mer démontée, il commandite la construction de la cathédrale reconnue aujourd’hui mondialement pour ses impressionnantes mosaïques.

Quoique passablement fréquentée, la ville, un ancien port de pêche, est particulièrement agréable et dispose même d’une petite plage où on a tourné une très belle scène de Cinema Paradiso. En grimpant sur la falaise qui domine la ville, on jouit d’une vue spectaculaire sur les environs.

 

Palerme, oui, mais… la mafia?

Les choses sont-elles en train de changer? Quelques commerces de Palerme affichent le logo « no pizzo » qui signifie qu’ils ne paient pas leur protection à la mafia. C’est le cas du très agréable café restaurant, Bisso établi dans le local historique de l’ancienne Librairie Dante qui sert une délicieuse cuisine locale à prix abordable. Aussi, à la boutique du Palais royal, on trouve des produits de Libera Terra, qui regroupe des coopératives travaillant sur les terrains confisqués à la mafia.

 

Louise Gaboury