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Les musiques du monde résonnent à Fès


En 2001, le Festival des musiques sacrées du monde a été reconnu par l'ONU comme un des 12 événements ayant le plus contribué à la construction du difficile dialogue entre différentes cultures et civilisations. Après huit ans, le Festival, qui se tient à Fès au début de juin, est devenu un événement incontournable pour les mélomanes du monde entier.

Le Festival permet à Fès, la troisième ville du Maroc, de renouer avec sa vocation de centre spirituel, scientifique et culturel. Chaque année, le temps d'une journée, le festival se déplace à Volubilis, un site romain situé à une soixantaine de kilomètres de Fès, inscrit sur la liste du patrimoine mondial de l'humanité de l'UNESCO.

En plus d'apprivoiser des musiques différentes, les festivaliers ont la chance de découvrir la plus ancienne ville impériale du Maroc, fondée en 789. Minutieusement préservée, Fès se laisse dévoiler doucement, pas à pas, le long des grandes avenues de la ville nouvelle et des 9200 rues et ruelles de la médina.

Le festival propose des conférences en matinée, mais on peut être tentés de les bouder une fois ou deux pour partir à la découverte de la fascinante médina. Pour 120 dirhams la demi-journée ou 150 dirhams la journée, un guide recommandé par l'hôtel peut faire visiter ses principaux points d'intérêt. Si on s'aventure seul, quelques dirhams donnés à un gamin nous permettront de retrouver notre chemin.
Dans la médina, on trouve de tout, des métiers anciens aux guichets automatiques, des cireurs de chaussures aux réparateurs d'appareils électroménagers. On traverse tour à tour le marché, où les agriculteurs voisins viennent vendre légumes, fruits, poules, lapins et poussins transportés à dos d'âne, le souk de la menuiserie datant du XVIIe siècle et récemment rénové avant d'arriver à la mosquée Karaouiyine et de continuer vers l'impressionnant quartier des tanneurs.

Le Festival dans la ville Les concerts de l'après-midi ont lieu dans les jardins du musée Dar Batha, havre de paix et de verdure, à l'ombre d'un chêne de Barbarie plusieurs fois centenaire. Le musée, consacré aux arts et traditions de Fès, est élogé depuis 1915 dans cette demeure palatine d'inspiration andalouse édifiée au XIXe siècle par le sultan Moulay Hassan 1er. Cette année, on y a vécu des moments extraordinaires avec la chanteuse de fado Katia Guerreiro à laquelle les hirondelles ont fait écho, le groupe irlandais Anuna et ses mystérieuses voix qui se répondaient sous les arcades et le charisme de la diva mauritanienne Dimi Mint Abba.

En fin d'après-midi, des concerts gratuits attirent une foule nombreuse sur la place Boujloud, une esplanade entourée de hautes murailles, située près de la porte du même nom reconstruite en 1913 dans un style traditionnel. Les spectacles du soir sont présentés dans le cadre somptueux de Bab Makina avec comme décor la cour de la citadelle surmontée de créneaux, située dans la partie nord de Fès el-Jedid.

Tout au long du festival, le café littéraire Fes Hadara présente des concerts populaires que les spectateurs écoutent religieusement en sirotant un thé à la menthe. Ce splendide ryad andalou, véritable îlot de sérénité dans le tumulte de la médina, se trouve dans un quartier résidentiel jadis réservé à l'aristocratie et aux ministres. Cinq minutes de marche dans un dédale de rues le séparent de Bab Boujloud.

Vers minuit, tous les spectateurs se dirigent vers le palais Mokri d'où la vue sur Fès et ses minarets illuminés est époustouflante. Chaque soir, s'y déroulent les soirées soufies. Le soufisme, une doctrine mystique de l'islam née au Xe siècle, est devenu une très importante source d'inspiration et d'éducation spirituelle au Maroc. Considérés plus ou moins comme des ascètes, les soufis, comme l'explique plus prosaïquement mon chauffeur de taxi, font beaucoup plus que prier cinq fois par jour et respecter le Ramadan. «Ils mangent peu et dorment peu», m'a-t-il précisé. En «spectacle», les soufis chantent des extraits du Coran et des appels à la prière et ils exécutent de curieuses danses, comme s'ils entraient en transe.

La nuit, les rues de la médina sont désertes. Elles appartiennent aux chats faméliques qui se disputent le contenu des poubelles et qui auraient eu tôt fait de dévorer les morceaux de pain que nous aurions pu être tentés de semer pour retrouver notre chemin.

Fès est desservie par avion (40 minutes) et par train (quatre heures) au départ de Casablanca.

Pour infos:
www.fezfestival.org

Louise Gaboury