Paris, Londres, Barcelone, New York et San Francisco: capitales gastronomiques

Paris : l’ancien et le nouveau

À côté des chefs plusieurs fois étoilés dont plusieurs ont filé à l’étranger exporter leur savoir-faire, une
 armada de jeunes chefs joue des coudes pour imposer leur vision de la cuisine.

Le retour des restaurants de quartier amène la gastronomie parisienne hors des sentiers battus. De jeunes chefs peu fortunés ont décidé de s’établir dans des rues moins fréquentées. Bienvenue dans le monde de la bistronomie, heureux mariage de cuisine gastronomique à prix doux et d’ambiance bistro, dans l’esprit du « Fooding » qui milite pour la bonne bouffe à bas prix. La salle de ces néo-bistros est habituellement petite, l’ambiance est familiale, et le cadre, intime. La cave fait la place belle aux vins de vignerons. Au menu, des plats traditionnels de cuisine familiale revus et corrigés, mais toujours aussi réconfortants. Les adresses, confidentielles au début, se transmettent rapidement de bouche à oreille jusqu’à ce que les néobistros affichent complet un mois à l’avance.

Yves Camdeborde a été le pionnier de la bistronomie. Stephane Jego (Chez l’ami Jean) et Sylvain Danière (L’ourcine), parmi d’autres, ont suivi. Camdeborde officie maintenant au Comptoir du Relais Saint-Germain, carrefour de l’Odéon. Tout à côté, il a ouvert la Crêperie du comptoir qui redonne ses lettres de noblesse au sandwich jambon beurre. Les étoiles montantes de la bistronomie sont William Ledeuil, un élève de Guy Savoy aux fourneaux de Ze Kitchen Galerie, et Gilles Choukroun chez MBC (pour menthe, basilic, coriandre). À surveiller également : ohlala, pré verre et Glou, ouvert récemment par Julien Fouin.

Londres : révolution de palais…

Londres a été élue capitale mondiale des gourmets par le magazine Gourmet en 2005. La capitale britannique compte plus de 6000 restaurants, 3000 cafés et bars et 5000 pubs et plus de 60 pays sont représentés sur sa scène culinaire. Depuis 2000, plus de 1000 nouveaux restaurants ont ouvert leurs portes à Londres avec un record de 158 ouvertures en 2007. Londres abrite une quarantaine de restaurants étoilés Michelin et leur nombre est en hausse constante depuis 2004. Cinq des 50 meilleurs restaurants au monde y ont pignon sur rue, contre huit pour Paris et quatre pour New York.

Les cuisines thaïlandaise et japonaises ont connu la croissance la plus rapide ces dernières années, mais la cuisine britannique a été redécouverte par de jeunes chefs, dont Jamie Oliver, et Gordon Ramsey. Ce dernier, dont le restaurant londonien éponyme est déjà étoilé, vient d’obtenir deux étoiles Michelin pour son nouveau restaurant Le Trianon, à Versailles. Des chefs britanniques qui débarquent en France? C’est le monde à l’envers! Le mouvement se fait encore dans l’autre sens toutefois avec Claude Bosi, formé par Ducasse et Passard, aux commandes du très couru Hibiscus.

D’autres restaurants londoniens valent le déplacement. C’est notamment le cas de Chez Bruce, où officie Bruce Poole. Mentionnons également Fergus Henderson du Saint John, et Rose Gray du splendide River Café, où Jamie Olivier a fait ses classes et où il a avoué avoir tout appris… ou presque.

Barcelone, une cuisine de produits méditerranéens

Barcelone c’est d’abord la Catalogne, connue pour la qualité de ses produits et pour les diverses influences, grecque, romaine, italienne, française qu’elle a subies au cours des siècles. Ses chefs choisissent le meilleur de la mer et de la montagne avec les crevettes, la poulpe la seiche, la sole, les anchois, le chorizo et autres charcuteries, la viande de porc et de volaille, poireaux, asperges, épinards et tomates. Tous ces produits sont agencés et dosés pour composer des plats imaginatifs à partir de recettes traditionnelles.

Les Espagnols aiment manger. Ils prennent leurs repas à ce qui nous semble des heures tardives : 15 heures pour le lunch et à partir de 22 h pour le souper. Entre temps, ils grignotent un peu. Ils raffolent des tapas des petits hors-d’œuvre concoctés avec des tranches de jambon, des olives, tomates, crevettes etc disposés dans de petites assiettes qu’on plaçait à l’origine sur les verres pour protéger leur contenu des mouches… À Barcelone, on peut les déguster à Inopia, un bar à tapas géré par Alberto Adriàn, frère du plus célèbre chef au monde, lui-même chef pâtissier chez El Bulli pendant l’été. Quimet y Quimet s’est spécialisé dans les tapas à base de conserves. Les Quim de la quatrième génération y servent haricots à l’ail, confiture de tomates et tapenade, morue à toutes les sauces, champignons et thon, etc…

La gamme des classiques de Ca L’Isidre se décline autour des saucisses, de la tête fromagée de taureau, du saucisson, des gianchette, de minuscules poissons frits, de calmars, etc. Dirigé de main de maître par Xavier Pellicer, double étoilé Michelin, ABaC propose une cuisine moderne créative à partir des produits de la mer, des potagers voisins et de la montagne comme son bouillon de riz aux piments et aux crevettes roses, et son cochon de lait aux pommes de terre.

New York, cuisine du monde

C’est la ville du corned beaf, des bretzels, hot dogs, cheesecake et bagels, pourtant  New York figure en bonne place sur la scène gastronomique internationale. Melting pot par excellence, la Grosse Pomme  a connu l’influence de la France, mais sa nouvelle cuisine, souvent inspirée de la cuisine asiatique, émerge en beauté.

Le chef propriétaire du Restaurant Jean-Georges qu’on dit le 3 étoiles le moins cher du monde, Jean-Georges  Vongerichten, possède plusieurs restaurants à Manhattan, dont le spectaculaire Spice Market décoré par Jacques Garcia. Crise oblige, les nouveaux établissements ont toutefois tendance à être plus modestes.

Les restos à la mode ouvrent et ferment au gré des tendances et de la popularité des quartiers, mais dans la dernière fournée d’établissements prometteurs, notons Corton  et son chef  Paul Liebrandt, et Momofuku Ko, dirigé par le chef David Chang. En 2007, Chang a gagné le prix de la Fondation James Beard de l’étoile montante, et cette année le Momofuku Ko, s’est mérité celui du meilleur nouveau restaurant. Chang est à la tête de plusieurs adresses new-yorkaises, dont le Momofuku Noodle Bar, plus abordable. Le même modèle s’applique à Nobu, multinationale de la restauration haut de gamme propriété du chef Nobu Matsushima et de Robert De Niro, dont le voisin,bien nommé  Nobu Next Door, est un rien plus abordable.

San Francisco, cuisine du marché

Depuis longtemps considérée comme « grano », San Francisco, impliquée dans la protection de l’environnement et dans le développement durable, reste le chef de file de la restauration verte, ce qui n’empêche pas un certain intérêt pour la viande, surtout quand elle provient d’élevages respectueux des animaux.

San Francisco tire profit de la proximité de multiples fermes qui alimentent ses marchés, considérés comme les meilleurs des Etats-Unis. Le plus couru? The Ferry Building, où les chefs les plus en vue s’approvisionnent. Plus de 80 fermiers des environs y vendent leur production. Les mardis et samedis, le marché accueille les vendeurs de produits transformés : confiture artisanale, produits de boulangerie, etc. Daniel Patterson, chef propriétaire du Coi et la chef Lauren Kiino viennent d’y ouvrir Il cane rosso, une rôtisserie qui sert des plats cuisinés à base de produits achetés à des fournisseurs locaux.

On trouve des femmes à la tête de quelques grandes tables de San Francisco. Mentionnons Alice Waters de Chez Panisse, une adepte de la philosophie « slow food », Nancy Oakes, chef du Boulevard,  Elizabeth Faulkner du restaurant bar Citizen Cake, qui a récemment attiré l’attention du Guide Michelin, et Traci Des Jardins, une franco-américaine, co-propriétaire de Jardinière. Elles sont toutes engagées dans la cuisine de marché et mettent en valeur les produits locaux qui font la spécificité de la cuisine californienne, et de celle de San Francisco en particulier.