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Mardi gras rural en Louisiane


Dans le sud-ouest de la Louisiane où on fait encore carême, le Mardi gras garde toute sa signification. Même si les célébrations varient d'un village à l'autre, entre les bals et les parades, le classique Courir du Mardi gras est sans doute la manifestation la plus spectaculaire.

Dans une atmosphère surréaliste, une centaine d'hommes déguisés partent en guête des ingrédients nécessaires pour faire le gumbo, un plat traditionnel à base de poulet et de saucisses. C'est le prétexte de la dernière fête, du dernier repas gras avant Pâques.

À l'heure des poules

À Elton, une petite ville située à mi-chemin entre Houston et la Nouvelle-Orléans sur la route 190, le courir du Mardi gras a lieu le dernier samedi avant le carême. Les "mardi gras", comme on appellent les hommes qui participent à la fête, arrivent vêtus d'habits décorés de franges qui évoquent les haillons des mendiants, le visage dissimulé sous un masque en moustiquaire et la tête recouverte d'un "capuchon" pointu. Quelques-uns sont habillés en femmes, des Blancs sont déguisés en Noirs.

Après avoir expliqué les règlements, le capitaine Mike Bazinet passe la parole su curé, lui-mêmedéguisé en évêque. La bénédiction expédiée, le grand défoulement peut commencer.

La caravane s'avance dans le petit matin. Certains des mardi gras sont à cheval. Ceux qui vont à pied font les pitres, grimpent aux arbres ou font le mort au milieu de la chaussée. D'autres ridiculisent la coutume du mercredi des cendres en traçant une croix sur le front des curieux avec des matières douteuses. Ils aspergent les passants d'eau, de désodorisant ou de poudre pour bébé, subtilisent des chaussures puis s'éparpillent de chaque côté de la route pour vider le trop-plein de bière. Debout sur leur cheval, les plus habiles esquissent un pas de danse au son de la musique traditionnelle.

La fête bat son plein

La bière et le "moonshine" (liqueur artisanale à base de maïs) coulent à flots et on fait circuler des coupelles de jell-o à la vodka aux couleurs du carnaval. Soudain, comme dans la chanson popularisée par Zachary Richard "Capitaine, capitaine, voyage ton flag"..., le capitaine agite son drapeau. C'est le signal qu'attendaient les mardi gras pour se ruer sur les occupants de la maison d'en face pour leur demander la charité. Le maître des lieux lance une poule en l'air et tous les mardi gras se précipitent pour attraper le volatil rétif. Après avoir reçu leur aumône, les mardi gras dansent en signe de reconnaissance, puis reprennent la route.

Le cortège s'allonge de maison en maison. La musique devient lancinante. Le capitaine fouette les récalcitrants qui s'enhardissent à défier les règles.

Les mardi gras ne reviennent à leur point de départ qu'en toute fin d'après-midi et dans quel état! Le gumbo est déjà prêt. Il y a belle lurette que les poulets fraîchement attrapés sont plumés. On n'a pas attendu le retour des mardi gras imbibés pour commencer la lente cuisson du gumbo, surveillée depuis le milieu de l'avant-midi par quelques hommes plus âgés. ses effluves embaument le voisinage. La fête continue pour ceux qui tiennent encore debout. C'est ce qu'on appelle ici "laisser le bon temps rouler"...

Louise Gaboury